par Antoine Gresland
Prix généralement constaté : 1 990 euros
Durée du test : deux mois
Petit à petit, mais avec constance, le constructeur norvégien Hegel est en train de se faire une place dans le cœur des amateurs de musique. Une réussite qui s’explique par une approche à la fois réaliste et innovante de la hi-fi incarnée, génération après génération, dans des appareils de plus en plus performants et toujours simples à utiliser dont nous avons souvent eu le plaisir de vanter les mérites. Ce n’est pas un discours marketing, c’est moi qui vous le dis, et je n’ai pas d’actions chez Hegel !
Un convertisseur 32 bits et beaucoup d’optimisation
Le convertisseur N/A Hegel HD25 vient prendre place au-dessus du HD20, un appareil qui démontrait déjà une maîtrise impressionnante du numérique à sa sortie de la part d’un bureau d’études dont c’était seulement le second DAC, après le HD10. Sur le plan pratique, il apparaît peu différent de son prédécesseur. Comme lui, il propose trois entrées S/PDIF (une optique et deux coaxiales), ainsi qu’un port USB asynchrone pour le relier à un ordinateur dans les meilleures conditions.
Doté de deux sorties analogiques (une asymétrique RCA et une symétrique XLR), le HD25 conserve aussi un niveau de sortie variable et une télécommande qui le transforme de facto en petit préampli numérique auquel il suffit d’adjoindre un bloc de puissance et une paire d’enceintes pour se composer un système. De quoi améliorer facilement une borne Air Port, un système Sonos, la sortie d’une box et, bien entendu, celle d’un ordinateur. Une opération aisée, puisque le Hegel, comme la plupart de ses congénères, installe automatiquement les drivers adéquats sur un Mac ou un PC lors de la connexion USB.
On pourra ainsi profiter de ses fichiers audio HD 24 bits jusqu’à 192 kHz, une fois le driver spécifique Hegel téléchargé depuis le site du constructeur et le petit switch placé à côté de l’entrée USB basculé en position B. Comme avec les autres DAC Hegel, la connexion USB permet à la télécommande d’agir sur les commandes de la plupart des lecteurs audio-vidéo Mac et PC pour sauter une plage, jouer ou mettre en pose la liste de lecture sélectionnée. Une fonctionnalité qui est également disponible avec la plupart des services de streaming tels que Spotify ou Rhapsody.
La qualité d’un convertisseur, c’est d’abord son alimentation, et dans ce domaine le Hegel HD25 a été particulièrement soigné ! À l’ouverture du coffret, on découvre huit rails individuellement redressés au plus près des composants qu’ils alimentent, sans oublier les composants de surface qui filtrent les tensions destinées aux DSP. On a aussi filtré l’arrivée du secteur, puis redressé par un double pont de diodes la sortie du petit transformateur torique qui alimente par deux enroulements secondaires les sections numériques et analogiques.
En matière de traitement du signal et de conversion N/A, le HD25 repose sur un circuit d’upsampling 24 bits – 192 kHz doté de sa propre horloge interne, suivi par un convertisseur 32 bits multiétage fonctionnant en sigma – delta AKM AK4399. C’est ce composant crucial qui est également chargé du volume variable, sur 100 pas. Il propose par ailleurs deux filtres numériques pour ajuster le son à son goût. D’une manière générale, tout a été fait pour réduire le bruit de l’appareil à sa plus simple expression et laissé passer le signal sans obstacle de l’entrée jusqu’à la sortie. Côté pile, on a pris soin d’isoler galvanométriquement par de petits transformateurs 75 Ω les entrées coaxiales S/PDIF et l’entrée USB pour éviter toute pollution et tout bruit indésirable en provenance des liaisons. Les deux premières bénéficient également de la technologie d’adaptation d’impédance développée par Hegel. Cette dernière est chargée de compenser l’impédance pas toujours idéale de certains câbles numériques RCA afin de réduire le jitter responsable, comme on le sait, de tous les maux en numérique.
Côté face, chaque composant constituant l’étage de sortie analogique a été choisi pour sa linéarité et sa stabilité, l’absence de courant de fuite permettant d’éviter la présence de condensateurs en série sur le trajet du signal. Le filtrage est ainsi confié à des amplis opérationnels Texas Instruments à faible distorsion ultrasilencieux (L49720 sur la sortie asymétrique et OPA827 sur la sortie symétrique) réputés pour leurs qualités musicales, et Hegel est fier d’annoncer la présence de transistors de sortie silicium germanium, également réputés pour leur faible bruit et leur fidélité au message. Sur le papier, c’est réussi, puisque la fiche technique du HD25 annonce un seuil de bruit à – 145 dB et un taux de distorsion typique de 0,0006 % ! Reste à savoir si tout cela se traduit en musique sur le terrain…

En plus de la petite télécommande, Hegel a prévu un autre moyen de changer d’entrée sur le HD25 : il suffit de taper deux fois sur le haut du coffret pour passer à la suivante. Sympa !
À l’écoute : les norvégiens n’ont pas froid aux oreilles !
Le HD20 était déjà une belle réussite pour son prix, mais le HD25, bien que plus cher, l’est encore plus malgré – ou grâce ! – à une concurrence qui ne cesse de proposer de nouveaux DAC. Incroyable de penser que cette petite machine soit capable d’un tel niveau de définition et de naturel, au point de tutoyer sans vergogne des appareils nettement plus onéreux. C’est vrai, son physique discret n’impressionne pas autant que celui de certains concurrents, mais c’est à l’intérieur que l’on a mis les sous, et c’est aussi bien comme ça ! Avec le HD25, Hegel prouve sa capacité à marier des qualités objectives de bande passante, de silence de fonctionnement et de détail sans pour autant basculer dans le côté audiophile pur qui oublie l’objectif premier d’un système hi-fi, à savoir se faire plaisir sans se poser de question. Sur le morceau live « Hijaz » du disque d’Hadouk Trio Baldamor, la couleur du Spacedrum et des percussions de Steve Shehan sont rendues avec une vérité frappante et une énergie palpable, parfaitement contrôlée d’un bout à l’autre du spectre. La scène sonore est ouverte et parfaitement disposée dans l’espace, alors que le bas du spectre apparaît très modulé et bien défini. Nous ne sommes pas tout à fait au niveau de nos références, notamment en matière de neutralité et de bande passante, mais elles coûtent plusieurs fois son prix…
Pas de frustration au pays de la musique, tant le HD25 apparaît facile à vivre sur des instruments acoustiques, comme sur de l’électro ou de la pop dévergondée. La restitution se montre virevoltante ou apaisée selon les circonstances, fluide pour peu que le signal soit de bonne qualité, et le HD25 parvient à se montrer précis sans être froid en toutes circonstances. À la limite, en le comparant avec un convertisseur professionnel, on pourra même le trouver un peu plus chaud que la neutralité absolue ne le commanderait, mais c’est au bénéfice du côté liquide et sensuel de la restitution. La voix profonde de Nick Cave, la sensation de matière sur une viole de gambe, la profondeur de la scène sonore du Live à FIP d’Eric Bibb, le Hegel les restitue avec une humanité généreuse qui n’interdit pas la distinction, bien au contraire. C’est ici que le HD25 fait la différence par rapport à son petit frère HD11 et bon nombre de compétiteurs distingués : les timbres et la précision font ici vraiment bon ménage, sous-tendus par une énergie réjouissante et contrôlée.
D’autant que son entrée USB fait preuve des mêmes qualités, pour peu que l’on se donne la peine de l’associer à un câble digne de ce nom. Dans ce domaine, on notera facilement la dimension supplémentaire apportée par un vrai fichier HD 24 bits – 96 kHz, comparé à son homologue 16 bits – 44,1 kHz. On gagne dans tous les domaines, pour atteindre une transparence vraiment remarquable à ce prix. Utilisé ainsi, dans des conditions idéales pour le DAC 32 bits, le Hegel HD25 devient une source sonore de haut niveau, c’est une évidence. Associé à un ordinateur par son entrée USB, il donne déjà des résultats étonnants, mais il faut l’avoir écouté à la sortie d’un lecteur réseau tel que le petit Moon MiND que nous avons testé récemment. Toujours sur des fichiers PCM 24/88,2 ou 24/96, on persévère encore un peu en fluidité et en définition tout en gagnant en convivialité. Ici encore, on pourra noter une très légère dérive par rapport à la neutralité absolue, mais rien à voir avec un appareil coloré, puisqu’il faut le comparer à notre enregistreur Nagra VI, droit comme un i, pour en prendre conscience. Doux et nuancé en haut, il sait répercuter la petite brillance d’un mixage spécifique – « Les Filles électriques » d’Alain Souchon – sans rendre l’écoute fatigante, avec cette sensation de présence naturelle et de dynamique qui donne encore envie de se laisser aller au morceau. On appréciera aussi sa bonne volonté à descendre pour explorer les dernières octaves d’« Il pleut » d’Émilie Simon, tout en intégrant ce grave monstrueux au reste de la bande passante. On peut faire mieux encore ici, mais il faudra investir sensiblement davantage pour marquer un vrai plus dans tous les compartiments de la restitution. Car, vous l’aurez sans doute compris : c’est à l’homogénéité de ses performances que le Hegel doit ses qualités musicales, plus qu’à un paramètre spécifique. La bonne surprise c’est que le HD25 propose un potentiel d’évolution supplémentaire à ceux qui choisiront de s’intéresser à ce qui se passe autour de lui, au-delà des câbles numériques et analogiques qui le relient au reste du système : un câble secteur de course, par exemple, lui donne des ailes en transcendant ses qualités naturelles de précision et de dynamique, tout comme l’utilisation d’un support de découplage qui joue, lui, plutôt sur l’image stéréo. En soignant ces à-côtés, on peut obtenir un résultat qui en étonnera plus d’un, au point de rejoindre les performances d’appareils nettement plus coûteux et renommés.
Enfin, son niveau de sortie variable utilisé en symétrique comme en asymétrique sur plusieurs amplificateurs prouve que le Hegel HD25 peut réellement jouer le rôle de préamplificateur. Sans offrir la même souplesse et la même transparence – notamment à bas volume – qu’une vraie section préamplificatrice, le circuit du Hegel permet ainsi de se constituer un petit système déjà très performant. Que demandez de plus ? !
En conclusion
Le convertisseur N/A Hegel HD25 est le digne héritier de son prédécesseur et parvient à faire mieux en poussant la performance un peu plus loin dans tous les domaines de manière homogène. Une petite machine particulièrement attachante qui sait aussi bien transcender la sortie USB d’un ordinateur en 24 bits – 96 kHz ou 192 kHz que servir de préampli numérique en symétrique ou asymétrique dans un système secondaire, ou servir de source principale dans un ensemble plus ambitieux. Vendu à peine 2 000 euros, il n’a cessé de m’étonner par ses qualités musicales dignes de bien des appareils plus chers, tout en offrant un fort potentiel d’optimisation. Avec sa petite télécommande qui sait parler aux ordinateurs, il ne lui manque rien pour faire un carton…
Les notes d’Audio Fédération :
Précision : 8/10
Dynamique : 8,5/10
Timbres : 8,5/10
Image stéréo : 8/10
Bande passante : 8/10
Musicalité : 16/20
Lecture de fichiers (entrée USB) : 17/20
Total : 74
(Référence actuelle : 97)
Fiche technique :
- Dimensions (L x H x P) : 210 x 60 x 260 mm
- Poids : 3,5 kg
- Entrées numériques : 2 coaxiales, 1 optique, 1 USB asynchrone
- Sorties lignes variables : 1 symétrique XLR, 1 asymétrique RCA
- Réponse en fréquence : 0 Hz-50 kHz
- Réponse en phase : filtre analogique à phase linéaire
- Plancher de bruit : – 145 dB
- Distorsion : moins de 0,0006 %
Sources : drive CEC TL51X VM, Oppo BDP-93EU NuForce XE lecteur réseau Moon 180 MiND ; préamplificateur : Linn Kisto ; amplificateur : Karan KAS 450 et Sugden Masterclass FPA-4 ; enceintes : ProAc Response ‘D’ Two, Leedh E2 ; caisson de basses : Linn AV5150, câbles de modulation symétriques : Linn Silver Interconnect, Esprit Eterna, asymétrique : Fa Dièse Harmonie Plus 2, Cardas Golden Cross ; câble numérique : MPC Audio Absolute coaxial , Real Cable optique TosLink ; câble USB : AudioQuest Carbon ; câble HP : Atohm ZEF MAX, Esprit Kappa, Linn K400 ; Supports : Klinger Favre Foating board , HRS R1; accessoires : pieds Millenium M-Puck, HRS Nimbus, plaquettes amortissantes HRS Damping Plate MK II, barrette secteur : Neodio PW1 ; câbles secteurs : Esprit Celesta & Eterna ; Esprit Manta